Une grande partie de mon travail est centré sur les apports de l'informatique à la littérature. Dans une perspective de plus en plus évidente d'affadissement du livre, notamment sur le plan créatif, ce qui m'importe c'est d'essayer d'imaginer une littérature qui tire partie de toutes les possibilités du numérique: générativité, mise en espace, traitements numériques du son et de l'image, hyperfiction, etc…
Dans la mesure où les espaces de communication numérique sont des ensembles virtuels indifférenciés, c'est-à-dire où il est très difficile, voire impossible de distinguer la réalité de la fiction, l'information de la littérature, la vérité de son apparence, il m'a paru intéressant d'exploiter un aspect particulier de cette confusion générale en exploitant les réseaux sociaux et, notamment, le plus connu d'entre eux, Facebook. On sait quel souci, notamment pour des raisons évidentes de commercialisation de ses données, Facebook a de faire croire que les personnes inscrites sur son réseau sont des personnes réelles. Pourtant, avec très peu d'habileté, il est possible, pour n'importe qui, de tromper la vigilance du réseau. De même, on sait que Facebook archive tout ce qui est produit dans son réseau et déclare en avoir la propriété. Il est donc aussi très tentant de produire à cet effet un nombre important de données fictionnelles visant à rendre plausible une saturation du réseau.
Dans ce but, un certain nombre de personnages de mon hyperfiction ont leur propre page Facebook qui se nourrit tous les jours, soit par des apports automatiques, soit par des apports non automatiques, soit par l'effet mécanique de la participation des "amis" qui ne savent rien de l'identité vide des personnages auxquels ils s'adressent.
Pour l'instant, sont ainsi des personnages Facebook fictionnels : Marc Hodges, Germaine Proust, Louis Ganançay, Rachel Charlus, Benjamin Cooper, Maurice Roman et Ronald Cline.
PS. L'image illustrant cet article est de Williams Tjampitjinpa.