• Pourquoi je n'ai pas écrit la plupart de mes livres

    Parce que :

    1. ça
    2. lui
    3. eux
    4. l’art
    5. ma vie
    6. le livre
    7. le désir
    8. tout ça
    9. le plaisir
    10. les livres
    11. parce que
    12. c’est ainsi
    13. Harlequin
    14. il y a la vie
    15. je n’écris plus
    16. c’est comme ça
    17. Marcel Duchamp
    18. je suis paresseux
    19. je suis comme ça
    20. j’aime finir les plats
    21. j’aime programmer
    22. je souhaite le potlach
    23. j’aime bien me répéter
    24. je n’ai pas de mémoire
    25. le monde n’est pas fixe
    26. je n’ai pas peur du vide
    27. je ne sais pas qui je suis
    28. je n’écris plus beaucoup
    29. l’inspiration est un travail
    30. l’imaginaire est calculable
    31. la beauté est un problème
    32. je ne lis pas tous les livres
    33. l’exégèse tue la littérature
    34. des textes je préfère le flux
    35. j’aime tout ce qui est relatif
    36. le monde change sans cesse
    37. je n’ai plus aucune certitude
    38. ça pose quelques problèmes
    39. j’aime l’en-soi des processus
    40. il n’y a pas d’absolu littéraire
    41. même si c’est vrai, c’est faux
    42. notre époque est spectaculaire
    43. Pierre Ménard de J.L. Borges
    44. la littérature met en jeu du jeu
    45. le livre est en soi un problème
    46. je ne sais pas ce que je produis
    47. j’écris pour prolonger le temps
    48. la beauté n’est pas le problème
    49. les formes ne sont jamais seules
    50. tout aurait pu se faire autrement
    51. l’ordinateur est un méta-médium
    52. je crois en la beauté des concepts
    53. toute création est communication
    54. la variation est l’essentiel du texte
    55. je crois en l’efficacité des concepts
    56. cette liste sera toujours incomplète
    57. je vis dans des contextes différents
    58. cette liste ne sera jamais exhaustive
    59. la génétique textuelle me fait vieillir
    60. tout livre est aujourd’hui un format
    61. j’ai besoin de l’épaisseur du monde
    62. j’ai toujours aimé écrire sur les murs
    63. je hais les gloses et les commentaires
    64. on ne sait jamais avec qui on couche
    65. il n’y a pas de vérité révélée du texte
    66. la littérature est une technique du réel
    67. je n’ai plus les naïvetés de ma jeunesse
    68. l’expression des sentiments me fatigue
    69. l’informatique est un langage universel
    70. je ne veux pas savoir ce qu’est un livre
    71. il n’y a plus de Grands Récits possibles
    72. il y a beaucoup de murs dans nos villes
    73. j’ai déjà souvent répondu aux pourquoi
    74. la programmation est un des beaux-arts
    75. j’aime jouer avec des objets composites
    76. je ne lis pas jusqu’au bout tous les livres
    77. je ne viendrai jamais à bout de cette liste
    78. l’informatique est un nouvel humanisme
    79. la plupart des livres ne sont que des livres
    80. le siècle à venir sera virtuel ou ne sera pas
    81. je crois en la force motrice de l’imaginaire
    82. je recherche une littérature à n-dimensions
    83. j’aime travailler sur le même et le différent
    84. je considère mes lecteurs comme des adultes
    85. le pourquoi m’importe plus que le comment
    86. le livre est devenu un instrument de pouvoir
    87. je ne sais pas où je vais mais je suis en route
    88. tout texte se crée dans la relativité des textes
    89. je préfère la consommation à la conservation
    90. la générativité est une exhaustivité reposante
    91. je ne sais pas pourquoi ce serait un problème
    92. la langue n’existe que par ceux qui la parlent
    93. quand le moment sera venu je dirai pourquoi
    94. la plupart de mes écrits ne sont pas des livres
    95. je rêve d’inscrire mes poèmes dans la lumière
    96. l’absolu de l’imaginaire est dans les processus
    97. je recherche une littérature non démonstrative
    98. je préfère privilégier la création sur la mémoire
    99. le livre qui n’a que cinq cent ans est trop jeune

    100.  je sais que vous n’irez pas au bout de cette liste

    101.  je suis venu trop tard dans un monde trop vieux

    102.  je ne connais pas de théorie sémantique correcte

    103.  je veux débarrasser la littérature de la subjectivité

    104.  nous sommes entre le 20 ème et le 21 ème siècle

    105.  je ne me prends pas pour un auteur de droit divin

    106.  le monde ne tient que par notre invention du monde

    107.  ce qui vaut la peine d'être fait vaut la peine d'être fait

    108.  « Les preuves fatiguent la vérité. » (Georges Braque)

    109.  le livre avec ses cinq cent ans a atteint sa limite d’âge

    110.  je rêve de faire de l’écriture un système d’interactions

    111.  l’état d’arrêt d’un texte n’est qu’un moment du texte

    112.  il existe aujourd’hui des machines à produire des livres

    113.  il n’y a pas de réponse simple à une question complexe

    114.  j’aime l’idée de faire de l’univers un support de lectures

    115.  je ne relis que très rarement les livres que j’ai lu une fois

    116.  je n’ai pas écrit la plupart de mes écrits qui sont des livres

    117.  je suis fasciné par la puissance absolu de l’opposition 0 et 1

    118.  j’aime travailler les oppositions entre le fixe et le dynamique

    119.  toute proposition littéraire est une proposition expérimentale

    120.  je souhaite remplir d’écrits toutes les dimensions de l’univers

    121.  il n’y a aucune raison aucune raison que cette liste s’arrête là

    122.  je me sens toujours enfermé dans ce que l’on appelle l’écriture

    123.  ce qui m’intéresse c’est la mémoire des processus de la création

    124.  toute écriture de livre doit se soumettre aux carcans de l’édition

    125.  dans chaque langue les mêmes mots disent infiniment de choses

    126.  j’aime par dessus tout faire du vélo au soleil à l’ombre des forêts

    127.  je déteste tout ce qui se présente comme ne devant jamais bouger

    128.  la littérature programmée a toujours affaire avec la métalittérature

    129.  Lautréamont, Raymond Roussel, Gertrude Stein et quelques autres

    130.  « Le langage est un ensemble statistique. » (Paul Valéry, Cahiers I)

    131.  les techniques numériques permettent de sortir la littérature du livre

    132.  je ne crois pas en dieu quels que soient les avatars dont on l’affuble

    133.  j’aime transformer les murs en des livres qui ne sont plus des livres

    134.  « Les livres ne sont jamais achevés. » (Paul Auster, Le carnet rouge)

    135.  je ne mesure qu’un mètre soixante huit (soixante neuf les bons jours)

    136.  la littérature est largement indépendante du médium spécifique qu’est le livre

    137.  les mots ne parlent du monde que dans la mesure où le monde nous parle

    138.  j’ai horreur du roman rouleau, du livre qui ne peut se lire que du début à la fin

    139.  écrire, c’est essayer de maîtriser le temps, son temps propre et celui des autres

    140.  je suis né le 3 octobre 1942 et non pas le 4, ce qui est essentiel dans mon œuvre

    141.  je cherche une distance entre l’écriture et la subjectivité : mon Je est un autre…

    142.  les quelques livres que j’ai écrits ne plaisent pas aux éditeurs qui me plaisent

    143.  je suis partisan du « jeu d’un vol ou d’une voltige indéfinie du sens » Derrida

    144.  je considère que Kant se trompe lorsqu’il affirme que la beauté est sans concepts

    145.  le plus difficile est de trouver la bonne manière de répondre à cette question

    146.  «Le récit — plus encore que le sexe — dit sans arrêt "encore !"» (Pascal Quignard)

    147.  « J'aime mieux une pensée fausse qu'une routine vraie. » (Alain, Propos d'un normand)

    148.  j’ai envie de tracer un sentier gratuit à l’écart des autoroutes payantes et trop fréquentées

    149.  ceux de mes écrits qui semblent être des livres sont souvent tout autre chose que des livres

    150.  l'ordinateur permet une anti-culture hiérarchique, quelque chose comme une « post-culture »

    151.  je ne recherche pas l’éternité (position métaphysique) mais l’infini (position mathématique)

    152.  “Tout ce que je fais et pense n’est que specimen de mon possible” (Valéry, Monsieur Teste)

    153.  « Il est possible pour un récit de continuer à s'écrire sans auteur. » (Paul Auster, Le carnet rouge)

    154.  « L'imaginaire est ce qui tend à devenir réel. » (André Breton, Le revolver à cheveux blancs)

    155.  programmer de la littérature consiste à travailler au niveau de l’imagination de l’imaginaire

    156.  « Ce qui est maintenant prouvé ne fut autrefois qu'imaginé. » (Blake William, Proverbes de l'enfer)

    157.  « La mission actuelle de l’art est d’introduire le chaos dans l’ordre » (T.W. Adorno, Minima Moralia)

    158.  « Les livres qui passent d'une époque à l'autre sont des fruits morts. » (Jean-Paul Sartre, l'homme ligoté)

    159.  « Que faire ? C'est avec cette question que j'ai commencé à ne pas dormir. » (Julio Cortazar, Marelle)

    160.  « Les paresseux ont toujours envie de faire quelque chose. » (Vauvenargues, Maximes et réflexions)

    161.  « Il faut apprendre à haïr la mort sous toutes ses formes. » (Gérald Neveu, Comme les loups vont au désir)

    162.  écrire relève toujours d’une conduite cognitive que j’oserai désigner comme « programmation expérimentale »

    163.  « Toutes choses furent faites par Hasard et rien de ce qui fut fait ne le fut sans lui. » (Luke Rhinehart, L'Homme-dé)

    164.  « N'est-ce pas ce qu'on peut faire de mieux avec l'écriture que dérouter ? » (Claude Ollier, Cité de mémoire)

    165.  « On ne peut pas transporter partout avec soi le cadavre de son père » (Guillaume Apollinaire, les peintres cubistes)

    166.  « La technologie évolue, le langage change, la voix mue, le destin nous incombe. » (Jean Baudrillard, Cool memories)

    167.  « Les livres sont ennuyeux à lire — pas de libre circulation — le chemin est tracé, unique. » (Henri Michaux, Passages)

    168.  S'intéresser aux concepts, croire au pouvoir des modèles, s'investir dans ce qui s’écrit — voilà qui submerge tout le reste

    169.  les mots du texte informatique sont irrécusables qui n'ont pas à fournir d'autres preuves que celles qu'ils portent en eux-mêmes

    170.  « L'art suprême et l'être suprême ont ceci de commun qu'ils dépendent entièrement de nous. » (E.M. Cioran, Aveux et anathèmes)

    171.  j’ai fait « écrire » mes textes par un ordinateur parce que l’idée m’en est venue, je pense que c’est une raison suffisante pour le faire

    172.  dés que l'écriture du monde cesse, le réel réaffirme sa présence ; dés que la subjectivitisation s'efface, l'objectivisation prend le dessus

    173.  la littérature informatique, telle que je la conçois, n'a rien à voir avec une littérature d'ingénieur elle se veut, avant tout, de la littérature

    174.  le recours à la technologie introduit une rupture volontaire, une mise à distance, une mise en évidence de la féconde opacité des mots

    175.  « Chaque fois que l'homme maîtrise il déclenche mille phénomènes immaîtrisables. » (Joseph Simas, Cet autre double en personne)

    176.  l’informatique permet de repenser totalement les relations du texte et du contexte, et ce jusque dans leurs conséquences les plus extrêmes

    177.  « Une vie se compose d'éléments multiples. Mais le nombre des compositions possibles est infini. » (Marc Saporta, Composition n°1)

    178.  « La valeur d'une pensée se mesure aux distances qu'elle prend avec la continuité de ce qui est déjà connu » (T.W. Adorno, Minima Moralia)

    179.  la littérature informatique a pour ambition de prolonger la littérarité dans les zones où les dispositifs antérieurs ne permettaient pas d'imaginer aller

    180.  l’ensemble des connaissances engrammées dans les possibles de texte est plus important que les textes produits et que l’être même de leurs auteurs

    181.  j’adore la possibilité de détourner un outil aussi pragamatique et industriel que l’ordinateur pour le mettre au service du non-indispensable

    182.  « Après cela qu'est-ce qui change et qu'est-ce qui change après cela et après cela et qu'est-ce qui change… » (Gertrude Stein, Lectures en Amérique)

    183.  « Les choses changent tellement ici. Chaque fois que je regarde de nouveau, il y a quelque chose de différent. » (Lewis Carroll, Sylvie et Bruno)

    184.  « J'aurais pu commencer par le chapitre I mais tout le monde même moi en aurait eu assez. » (Gertrude Stein. L'histoire géographique de l'Amérique)

    185.  « C'est à travers ce qu'il fait que l'homme vit et revit son empoignade radicale avec ce qui le défait, et qui est la mort. » (Daniel Sibony, Entre dire et faire)

    186.  « Puisqu'il faut raconter, l'idéal serait que la machine à écrire (j'écris à la machine) puisse continuer à taper toute seule… » (Julio Cortazar, Les fils de la Vierge)

    187.  « Il créait des romans que non seulement l'on pouvait lire, entendre et voir, mais dans lesquels on entrait comme en un jardin. » (Ernst Jünger, Abeilles de verre)

    188.  nous sommes à l’ère des prothèses où la machine devient un prolongement naturel de l'homme pour un corps non immédiatement sensoriel mais pensé

    189.  “La technique offre une voie de choir hors du monde, de penser un autre monde, de réaliser un simulacre d’autre monde.” (Marc Guillaume, Figures de l’altérité)

    190.  « Subitement eh bien peut-être pas subitement mais peut-être oui je sais où je vais et je n'aime pas ça comme ça. » (Gertrude Stein, L'histoire géographique de l'Amérique)

    191.  « On prend les romans parus dans la Revue des Deux Mondes au 19 ème siècle, on rajoute des avions et des téléphones, et le tour est joué. » (Philippe Sollers, Passion fixe)

    192.  la littérature n'existe que parce que, tournant, bougeant, elle se maintient, perdure dans des mouvements complémentaires, seuls capables de lui permettre de surmonter le chaos

    193.  La littérature n'a pour moi d'intérêt que comme mise en scène, exemplarisation, de l'inter-générativité du sens, plus exactement des sens, avec toutes les ouvertures signifiantes de cette expression

    194.  « Si les années m'ont appris une chose, c'est ceci : du moment qu'on a un crayon dans sa poche, il y a de fortes chances pour qu'un jour ou l'autre on soit tenté de s'en servir. » (Paul Auster, Pourquoi écrire ?)

    195.  « L'histoire commence et s'arrête, avance et puis se perd, et, entre chaque mot, quels silences, quelles paroles s'échappent et s'évanouissent pour ne jamais reparaître. » (Paul Auster. Le voyage d'Anna Blume)

    196.   Du point de vue d'un romancier, tout pouvait être modifié et amélioré, révisé, renouvelé à l'infini — chaque plan ne représentait qu'une face d'un grand volume à révéler. » (Richard Ford, Une situation difficile)

    197.  “Je sens infiniment le pouvoir, le vouloir, parce que je sens infiniment l’informe et le hasard qui les baigne, les tolère, et tend à reprendre sa fatale liberté, sa figure indifférente, son niveau d’égale chance.” (Valéry. Monsieur Teste)

    198.  Il n'y a plus de « culture » ayant valeur immanente nécessairement liées aux sociétés hiérarchisées et qui n'ont jamais empêché la barbarie, mais un ensemble de "cultures" à égalité (Georges Steiner. Dans le château de Barbe-Bleue)

    199.  Tant d’histoires tronquées se déroulent à chaque heure sur cette sombre terre qu’elles ont presque la supériorité sur les autres dont les personnages « posent des fondations pour l’éternité, d’une durée plus brève que la destruction et la ruine. » (Thomas Hardy, A la lumière des étoiles Garnier-Flammarion, 1987)

    200.  "Je rêve d'un livre qui serait assez puissant pour contenir tous les éléments de son être : mais ce n'est pas le genre de livre auquel on est habitué de nos jours. Par exemple, sur la première page : un résumé de l'action en quelques lignes. On pourrait ainsi se passer des articulations du récit. Ce qui suivrait serait le drame à l'état pur, libéré des entraves de la forme. Je voudrais faire un livre qui serait libre de rêver." (Lawrence Durrell, Justine)


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